Le lundi, jour du lavage

Le lundi, en toute saison, beau temps mauvais temps, c’était jour du lavage à Limoilou, comme partout ailleurs dans les années 1950. Il fallait que cette corvée ait lieu le lundi, sinon ça jasait chez les commères du voisinage. « Madame chose est malade, y’a rien sur sa corde » ou « Madame chose est en retard dans son ordinaire. Elle doit paresser aujourd’hui. »  Le lavage, c’était le lundi. Point à la ligne !

Maman commençait très tôt cette corvée. Vers sept heures, elle sortait la grosse laveuse du placard. Il fallait l’installer près de l’évier, brancher les tuyaux, ouvrir les robinets. Puis, elle allait dans la cave pour chercher une grosse cuve qui servirait à recevoir le linge sortant du tordeur. Maman séparait le linge en deux piles : le pâle et le foncé.La laveuse, le « moulin à laver » disaient certains, se mettait alors en marche en faisant un bruit assourdissant. L’opération durait une quarantaine de minutes. Quand sa « brassée » était terminée, maman passait chaque morceau dans le fameux tordeur pour l’essorer en faisant très attention de ne pas se coincer les doigts dans cette invention du diable. Si on s’approchait trop de la machine à laver, elle nous criait de faire attention à nos doigts. On racontait des histoires effrayantes sur des enfants qui s’étaient pris les mains entre les rouleaux du tordeur. Certains avaient même dû être amputés…

Le spectacle des cordes à linge

Quand je revenais chez nous pour dîner, j’admirais ces dizaines de cordes à linge tendues au-dessus des arrière-cours des maisons. Flottaient au vent draps, serviettes, chemises et salopettes… sans compter la lingerie féminine, ces dessous féminins qui nous émoustillaient, nous, les jeunes de cette prude époque qui n’avions la chance de voir des sous-vêtements féminins que sur les photos du catalogue Eaton…On aurait dit que tout le quartier affichait au grand jour ses couleurs, ses préférences et ses secrets. On en apprenait beaucoup sur les gens en regardant ce qu’il y avait suspendu à leur corde à linge.

Le repassage

Quand le linge était sec, j’aidais ma mère à le rentrer dans la maison. C’était alors le repassage. Maman repassait tout, même les mouchoirs. Les chemises blanches de mon père qui portait un uniforme devaient être impeccables. Le col et les poignets étaient même empesés. Des jeans ou des pantalons froissés ? Pas question. Tout passait sous le fer à repasser. Quelle corvée !Le proverbe dit : « Gros lundi p’tite semaine. » Gros lundi en effet, sauf que le reste de la semaine amenait aussi son lot de tâches domestiques. Comme disait Yvon Deschamps : « Ma mère ne travaille pas, elle a trop d’ouvrage ! » À lire aussi : Quand la ruelle était un fabuleux terrain de jeux

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