Beauport 2020 : de nombreuses précisions demandées, qualité de l’air en tête
Qualité de l’air et de l’eau, impacts sur la faune et la flore, et plus : l’Administration portuaire de Québec a reçu, le 24 avril dernier, plusieurs demandes de précisions de l’Agence canadienne d’évaluation environnementale, concernant son projet Beauport 2020. Bref survol des questions en suspens.
C’est dans un document de quelque 290 pages que l’Agence canadienne d’évaluation environnementale (ACEE) a fait parvenir ses interrogations à l’Administration portuaire de Québec (APQ).Déjà, la table des matières donne le ton : qualité de l’air, de l’eau et des sols, environnement sonore et lumineux, aspects liés à l’hydrodynamique, aux courants et glaces, à l’érosion, aux éléments biologiques, aux poissons et leurs habitats, aux milieux humides et leur végétation, aux oiseaux, aux espèces envahissantes ou encore aux impacts sur le milieu humain. Chaque élément à préciser est détaillé et explicité dans le document, qu’on peut d’ailleurs trouver sur le site Web de l’Agence.
Précisions demandées sur la qualité de l’air
La qualité de l’air semble prendre la part du lion des demandes de l’ACEE.En entrevue au journal Le Soleil, Véronique Lalande, porte-parole de l’Initiative citoyenne de vigilance du Port de Québec, estimait « normal » que ce thème soit tout particulièrement mis de l’avant dans le contexte de ces précisions :
C’était le plus grand absent, et l’absent le plus pathétique. On fait comme si ça n’existait pas et on espère qu’on ne s’en rendra pas compte – mais l’Agence et ses experts ne sont pas dupes. »
Sont demandées – entre autres – dans cette section des explications par rapport à certaines divergences trouvées parmi des études fournies, des informations à compléter ou à préciser quant à la modélisation climatique fournie et l’impact du fleuve sur celle-ci ou aux données utilisées. Des indications sont aussi sollicitées quant au bassin atmosphérique couvert, ou encore aux limites temporelles choisies pour l’évaluation environnementale.Sur ce point, on précise que les données de 2013 à 2015 de la station du Vieux-Limoilou ont été retenues pour évaluer la qualité de l’air à l’été de référence dans la zone du projet, des données jugées « non représentatives » par certains mémoires – dont celui de l’Initiative citoyenne. Sont donc demandées des données dans un horizon temporal plus large – antérieures à 2013 – de façon à « avoir une description plus représentative de l’état de référence de la qualité de l’air ».
Des calculs et modélisations à refaire ou préciser
À cela s’ajoutent également des préoccupations sur les unités choisies quant à la mesure et la modélisation liée à certains contaminants, ainsi que sur les méthodes de calcul des concentrations initiales de ceux-ci.Sans oublier la question de la valeur maximale des contaminants – laquelle devrait être révisée en utilisant des paramètres « les plus conservateurs possible, puisqu’il y a déjà un cumul d’impacts environnementaux dans le secteur du projet ». Ou encore d’intégrer de plus larges paramètres quant à la modélisation des émissions de particules – notamment en ce qui concerne le transbordement de vrac solide.Dans tous ces cas, l’Administration portuaire de Québec est ainsi invitée à réviser ses calculs, et refaire ses modélisations ou encore justifier et expliquer plus avant ses choix, tout en fournissant les documents ou visuels appropriés. De plus, les scénarios soumis devront également être révisés, en intégrant la nouvelle donne – par exemple, concernant la question des particules.L’ACEE soulève également des questions quant aux stations de surveillance de la qualité de l’air. Ainsi, pour l’Agence, alors que le Port de Québec parle de cinq stations sur son territoire, qui s’ajoutent à celles du ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, il n’explique pas pourquoi, sur cet ensemble, il a jugé nécessaire de n’utiliser que les résultats de trois d’entre elles pour établir l’état de référence.
Le promoteur n’explique pas pourquoi les données de l’ensemble de ces stations ne sont pas présentées et considérées dans l’étude d’impact », peut-on y lire.
Dans le même esprit, il est suggéré d’élargir les lieux d’intérêt et récepteurs – en ajoutant notamment la plage de la Baie de Beauport, la marina du bassin Louise, la Pointe-à-Carcy ou encore la piste cyclable longeant le Domaine Maizerets. « De plus, les résidences les plus rapprochées du Port dans chacune des directions doivent également être considérées comme des récepteurs sensibles. »
Impacts sur la faune, la flore et l’humain
Chaque section, bien que d’une longueur plus restreinte, est tout aussi détaillée. Sans entrer dans le détail, on peut tout de même survoler les différents éléments mentionnés.Ainsi, il est demandé de mettre à jour les plans liés à des situations d’urgence, que ce soit dans un contexte environnemental, ou dans le cas de défaillances ou accidents.Il est proposé de préciser la nature des travaux liés au prolongement de la voie ferrée, ou encore de réviser ou expliquer plus avant certains aspects de son évaluation économique – quant au nombre de navires attendus, ou encore au nombre d’emplois créés par année, ou aux retombées économiques attendues du projet, voire aux impacts du projet d’agrandissement sur le potentiel économique de la Baie de Beauport. Des précisions quant aux effets cumulatifs du projet sur le paysage de Québec sont également sollicitées.En fait, l’ACEE demande, globalement, de détailler la raison d’être même du projet :
Il n’a pas été clairement démontré que la superficie actuelle de la péninsule portuaire est insuffisante pour convenir aux besoins d’opération actuels et futurs de l’APQ », explique-t-on, faisant référence aux interrogations soulevées dans le mémoire du Groupe d’initiatives et de recherches appliquées au milieu (GIRAM).
Des informations additionnelles sont également demandées concernant l’impact des travaux sur le bar rayé, une espèce de poisson protégée en vertu de la Loi sur les espèces en péril et, ainsi, justifier plus avant le choix du site de Beauport.En fait, en sus des questions liées au bar rayé, des interrogations sont nombreuses concernant les diverses espèces aquatiques touchées – esturgeon noir ou jaune, alose savoureuse, moule d’eau douce et plus.De façon générale, l’ACEE indique :
Aucun plan compensatoire n’est concrètement présenté à l’étude d’impact pour contrebalancer les dommages sérieux au poisson qui s’étendra sur près de 300 000 mètres carrés d’habitats de haute valeur, liés notamment à des fonctions touchant la reproduction, l’alevinage et l’alimentation du poisson, dont plusieurs espèces visées sont à statut précaire. »
La présence d’un milieu de nidification de diverses espèces d’oiseaux, tels l’engoulevent d’Amérique ou l’hirondelle de rivage, et les façons de préserver cet habitat, figurent également parmi les éléments cités. Des mesures d’atténuation doivent être précisées dans divers cas, entre autres en ce qui concerne les milieux humides de la zone du projet.Des lacunes sont également soulignées en ce qui a trait aux impacts récréotouristiques des travaux d’agrandissement et de l’agrandissement lui-même, tout particulièrement en ce qui a trait aux activités nautiques effectuées dans le secteur, ou encore aux accès et au système de transport – routier, cyclable – entourant le secteur concerné par le projet.
L’analyse des questions amorcée
En entrevue au Soleil, la porte-parole du Port de Québec, Marie-Andrée Blanchet, indiquait que l’APQ « avait débuté l’analyse des questions avec les experts collaborateurs ».Une fois les informations transmises à l’ACEE par l’APQ, cette dernière fera l’étude des informations transmises, pour éventuellement produire une première opinion sur le projet qui, elle, sera l’objet d’une nouvelle consultation.
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