Beauport 2020, les mémoires (2) : Des inquiétudes, du transport à l’impact environnemental

2015-07-14-port-ml-03Le processus de consultation du projet Beauport 2020 est complété. L’Agence canadienne d’évaluation environnementale (ACÉE) en est à faire le point – sur les documents fournis par l’Administration portuaire de Québec, sur les mémoires et témoignages recueillis. Justement, qu’en est-il de ces mémoires ? Monlimoilou a survolé 14 d’entre eux. Second sujet : les questions de sécurité publique et l’impact sur l’environnement et les infrastructures.

2015-07-14-port-ml-03Le processus de consultation du projet Beauport 2020 est complété. L’Agence canadienne d’évaluation environnementale (ACÉE) en est à faire le point – sur les documents fournis par l’Administration portuaire de Québec, sur les mémoires et témoignages recueillis. Justement, qu’en est-il de ces mémoires ? Monlimoilou a survolé 14 d’entre eux. Second sujet : les questions de sécurité publique et l’impact sur l’environnement et les infrastructures.

Premier constat, partagé par plusieurs : l’aspect incomplet des informations présentées au fil des quelque 1500 pages de documentation soumises par l’Administration portuaire de Québec (APQ).

Nous déplorons le fait que l’étude d’impact ne comprenne pas la phase d’exploitation du projet, ou très peu, en raison de l’inconnu qui plane autour des futurs utilisateurs du site. Nous comprenons que des considérations économiques d’offre et de demande ne permettent pas actuellement à l’APQ de connaître les futurs utilisateurs du quai. Toutefois, de ce fait, l’étude d’impact environnemental ne peut être qu’incomplète et il est impossible de cerner l’entièreté des risques et des effets liés à ce projet, tant sur le plan environnemental qu’en matière de santé et sécurité », indique dès le départ l’Organisme des bassins versants (OBV) de la Capitale.

Ainsi, plusieurs s’inquiètent de la nature des éléments qui seront transbordés à Québec :

Si les informations fournies actuellement par l’APQ ne permettent pas d’identifier avec précision les produits qui composeront [le vrac liquide], plusieurs indices laissent penser que les hydrocarbures et certaines matières dangereuses y occuperont une part importante », assure-t-on du côté de Nature Québec.

Dans le même esprit, le Groupe d’initiatives appliquées au milieu (GIRAM) craint « un changement de vocation du Port de Québec et non une simple opération de modernisation ou d’augmentation de capacité », relativement à l’ajout de ces substances à l’offre de service de l’APQ.

Risque accru de contaminants ?

port001Résultat ? « Il y a lieu de craindre que le transbordement de produits pétroliers et de substances toxiques ou explosives augmente sensiblement avec l’agrandissement du port », selon Québec solidaire Capitale-Nationale.Cela, sans compter le potentiel de risque accru que présentent d’autres contaminants.

Les risques élevés associés à ce type de transbordement, conjugué aux volumes importants qui pourraient être transités, pourraient avoir des impacts dévastateurs, tant sur le plan environnemental que social. Il est certain que si cette intention ou possibilité s’avérait la véritable raison d’être du projet, elle susciterait un soulèvement sans précédent dans la région », fait valoir Accès Saint-Laurent Beauport (ASLB).

D’ailleurs, le Comité de vigilance des activités portuaires (CVAP) souligne l’impact potentiel du transport ferroviaire accru qui sera lié aux activités de Beauport 2020 : hausse du risque pour la population locale par rapport aux substances transportées, hausse du bruit ou des vibrations.

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Le Conseil régional de l’environnement (CRÉ) Capitale-Nationale, lui, est critique quant aux moyens de réponse à des situations d’urgence proposées dans le mémoire déposé par l’APQ.

On constate que certaines mesures d’atténuation ne s’appliqueront que lorsque les exigences légales ne seront pas respectées. En ce sens, une contamination aura déjà eu lieu au-delà des valeurs guide. Les mesures d’atténuation ne semblent pas être vues comme une mesure de prévention de la contamination, mais plutôt comme une mesure de mitigation.

Des manques observés dans l’étude d’impact

Photo : Xavier DachezDes mémoires soulèvent aussi l’absence d’analyse sur les conséquences de l’augmentation du transport maritime sur l’érosion des berges ou sur les infrastructures déjà existantes, les effets des eaux de ruissellement présentes sur le site, les conséquences du dragage des fonds marins, les risques liés à l’arrivée d’espèces envahissantes, l’impression que les effets des activités de dragage seraient sous-estimés, la question des conséquences sur le paysage, ou encore l’impact des installations sur la faune aquatique, de la flore ou sur les divers habitats fauniques des zones terrestres.

Les impacts du projet sont présentés uniquement sur les habitats confinés à l’intérieur de la zone de chantier, sans prendre en considération la façon dont la capacité de support, la connectivité et la productivité des habitats environnants seront affectées », explique Nature Québec.

Ce manque représente, pour ce même organisme, rien de moins qu’une non-reconnaissance « des principes de base de l’écologie ».

Il en découle alors un portrait incomplet qui favorise les intérêts du promoteur en minimisant l’importance des impacts environnementaux. Ceux-ci sont d’ailleurs qualifiés de mineurs et non importants, en dépit du fait que les effets seront permanents et irréversibles.

En fait, on parlerait ainsi, selon ce mémoire, de près de « 39 acres de milieux perdus ou modifiés » pour Beauport 2020, dont les impacts et effets viendraient s’additionner aux empiétements antérieurs. « Les impacts du projet Beauport 2020 ne sont pas marginaux considérant qu’ils amplifieront les effets observés dans le passé », ajoute-t-on.

Des conséquences pour l’eau potable ?

La modélisation de l’impact des infrastructures sur les prises d’eau de Québec est également remise en question par de multiples intervenants.

Nous sommes préoccupés par l’absence d’analyse poussée concernant la protection des sources d’eau potable de la ville. Nous croyons qu’il serait nécessaire que l’APQ réalise une modélisation de la dispersion du panache de l’effluent en incluant toutes les prises d’eau potable de la Ville de Québec. Même si les risques de contamination ont été définis comme négligeables, cette étude permettrait d’assurer la sécurité de la population du Vieux-Limoilou tout en réduisant les coûts de traitement des eaux potables et usées pour la Ville », trouve-t-on dans le mémoire du conseil de quartier Vieux-Limoilou.

La Baie de Beauport menacée ?

Baie de BeauportPour plusieurs des organismes, les usages de la Baie de Beauport seraient directement touchés par l’agrandissement du Port de Québec.

Même si une nouvelle plage pourrait être aménagée à proximité des nouveaux terrains créés par le projet Beauport 2020, celle-ci ne pourra jouer son rôle d’attrait majeur et d’élément intégrateur pour l’ensemble des autres attraits à caractère naturel en raison de l’environnement industriel omniprésent dans lequel elle se retrouverait. Alors que l’agrandissement des capacités portuaires pourrait se réaliser à beaucoup d’autres endroits sur le Saint-Laurent, le développement récréotouristique est tributaire du site exceptionnel de la Baie de Beauport », indique ASLB.

Du côté de Québec solidaire Capitale Nationale : « La qualité du site de la Baie de Beauport est également menacée. Les citoyennes et citoyens du secteur de Beauport s’inquiètent à juste titre de l’avenir de la plage de Beauport qui permet à des centaines des milliers de personnes d’avoir accès à des activités de loisir et de sport nautique dans un [lieu] magnifique qu’il faut préserver. »

Un constat partagé par le CRÉ : « Les activités de contact direct, comme la baignade et la planche à voile, pourraient être compromises. » Nature Québec va plus loin, mentionnant qu’en regard de la planification des activités de transbordement, « les activités balnéaires de la Baie de Beauport seront suspendues, peut-être plusieurs fois par semaine, une fois le projet en fonction ».

Après un investissement de 50 M$ – dont 19 M$ de fonds publics – pour son aménagement en 2008, l’autorisation de la baignade et un achalandage record en 2016, c’est un recul important qui se profile pour l’un des seuls accès directs des résidents de Québec à leur fleuve.

Ainsi, pour la Baie de Beauport, deux grandes questions ressortent : a-t-on bien documenté les conséquences des nouveaux aménagements sur le milieu naturel, et a-t-on pris en compte leurs impacts sur l’industrie récréotouristique ?

[Demain : Quels impacts économiques ?]

Pour lire la première partie : Beauport 2020, les mémoires : qu’en est-il de la qualité de l’air ?

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