Ce vendredi 9 mars, au cinéma Le Clap, à Sainte-Foy, le film Bras de fer des frères Jean-Laurence et Jonathan Seaborn prend l’affiche. Une véritable épopée de quelque 77 minutes qui documente et relate cinq années d’engagement citoyen mené par Véronique Lalande et Louis Duchesne face à l’Administration portuaire de Québec quant à la qualité de l’air dans la Basse-Ville de la capitale.
Bras de fer : documenter le combat
Ce vendredi 9 mars, au cinéma Le Clap, à Sainte-Foy, le film Bras de fer des frères Jean-Laurence et Jonathan Seaborn prend l’affiche. Une véritable épopée de quelque 77 minutes qui documente et relate cinq années d’engagement citoyen mené par Véronique Lalande et Louis Duchesne face à l’Administration portuaire de Québec quant à la qualité de l’air dans la Basse-Ville de la capitale.
Un beau jour, sur la piste cyclable de la 8e Avenue, deux citoyens se croisent. Véronique Lalande, d’un côté, quelque temps après le premier épisode de poussières rouges, dans les balbutiements de son action citoyenne. Jean-Laurence Seaborn, de l’autre, dans la foulée de la sortie du documentaire qu’il a piloté avec son frère Jonathan, Pas de piquerie dans mon quartier.
L’échange est bref. Les coordonnées échangées rapidement.
Le cinéaste est convaincu : il se passe quelque chose, il faut le documenter. La citoyenne fait confiance au cinéaste, lui donnant accès, en toute transparence, tant à sa démarche qu’à sa famille. Le cinéaste, lui, décide de faire les choses à l’envers – filmer à ses frais, sans garantie aucune. Le sujet est là. Le film – et son financement – viendront après. S’ils viennent.
S’amorce ainsi la première de quelque 55 sorties. Les premières minutes de plus de 120 heures de tournage – assemblées de cuisine, assemblées publiques, conférences de presse, entrevues, du terminal de croisières à l’hôtel de ville, des ruelles de Limoilou aux corridors du palais de justice de Québec. Premiers jours d’un travail de passion, d’un mandat citoyen, qui s’échelonnera sur près de cinq ans.
Cinq ans à suivre une saga qui, à bien des moments, a semblé finir.
Une série de petites victoires – et de petites défaites. Autant de moments qui auraient pu faire que le film allait se terminer « là », où tout aurait pu être réglé… Mais où la vie – et les autorités en place – en auront décidé autrement. Bras de fer est devenu ainsi une série de vagues où les moments d’allégresse de ces – nombreuses – petites victoires qui ont jalonné le parcours de Véronique Lalande et Louis Duchesne sont métamorphosés en déceptions, par le biais de l’inaction de tel ou tel acteur.
Et, dans l’absolu, on pourrait encore être en train de filmer, au moment où l’on se parle. Il y a deux recours collectifs qui cheminent actuellement. Véronique et Louis passent encore de longues heures sur le dossier, à préparer et documenter les recours, à continuer à travailler pour défendre les intérêts – et la qualité de l’air – des résidents et résidentes des secteurs touchés », explique Jean-Laurence Seaborn.
Faire vivre l’action citoyenne
Au fil de ces cinq années, les deux documentaristes ont suivi Véronique Lalande, dans le travail et l’effort, dans les joies et les peines. À ses côtés, ils ont vécu le dossier. Chaque victoire et chaque espoir gâché. « Dans Bras de fer, ce qu’on essaie de partager, c’est ce qu’on a vécu… En fait, on ne veut pas juste te raconter l’histoire, on veut te la faire vivre », lance le cinéaste.
Au gré du film, on découvre une série d’instants, de moments. Ceux qui suivent un appel lancé, parfois à moins de quinze minutes d’avis – où l’urgence dictait l’horaire. Ou d’autres, préparés, où une dizaine, plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de citoyens se rencontraient pour échanger. Des assemblées d’une, deux, trois heures, où il importait de tout filmer – question d’être certains d’avoir le moment, la réplique, l’échange, celui qui allait faire bouger, celui au fil duquel tout allait basculer.
Caméra à l’épaule, les frères Seaborn sont là. Souvent à distance, pour ne pas s’imposer, pour laisser les choses aller. Sans perche, profitant plutôt de micros répartis dans l’espace, ou sur les intervenants. S’imposer progressivement – faire sa place, gagner la confiance. Et surtout, respecter les propos des intervenants du dossier : ne rien dénaturer, ne rien transformer – gagner la confiance des sources, et la conserver. Il en résulte une caméra présente, mouvante. L’image comme témoin de l’action citoyenne, décortiquée de A à Z. Et surtout témoin de l’urgence qui découle de la situation – l’urgence d’agir.
Le fardeau de la preuve
Au fil des événements, d’autres moments. Souvent croqués dans des conférences de presse. Le Port. La Ville. Les gouvernements. La Santé publique. Qui tentent de rassurer. Qui tentent de minimiser. Ou qui demandent à être convaincus de l’urgence de la situation – malgré la méticuleuse documentation accumulée, au fil du temps, par les citoyens, malgré le fait que, selon des documents officiels, une alarme avait déjà été donnée, en 1978, concernant la compagnie Arrimage Québec, « qui pourrait constituer un facteur de dégradation de la qualité de l’air et de l’eau »… Et malgré bien d’autres éléments… Il est clair : le fardeau de la preuve, dès les premiers jours, était mis sur les épaules des citoyens. Les autorités, malheureusement, ne sont pas toujours au rendez-vous pour les défendre…
À travers tout ça, Bras de fer, c’est une histoire d’amour. C’est l’histoire d’un couple, Véronique et Louis, qui ont fait face à la crise, et qui, comme couple, ont réussi à passer ensemble à travers. C’est aussi l’histoire de citoyens intelligents, engagés, actifs, qui contribuent par leur action à rendre meilleure notre société », explique Jonathan Seaborn.
C’est cette dimension citoyenne, d’ailleurs, qui aura mené le jury du Festival international du film des droits de l’homme, à Paris, à récompenser Bras de fer. À cause de la richesse de la démarche citoyenne documentée ; à cause du rôle de lanceurs d’alertes qui y est mis de l’avant, essentiel à la bonne marche de la démocratie ; et parce que ce film présente un portrait de la citoyenneté d’aujourd’hui, engagée, active, facteur de changement.
En fait, ce film-là, dans le fond, on aurait pu aussi l’appeler “Merci Véro et Louis” ! Et je crois que c’est important, ça, que les gens sachent ce que ces deux citoyens-là, ils ont fait pour nous, important que ça se voit. Ils se sont levés, un beau matin, pour nous tous et toutes, sur ce dossier-là. Ils l’ont documenté. Ils ont porté la parole des citoyens et citoyennes. C’est quelque chose ! » lance Jonathan Seaborn.
Et, oui, on n’en est pas arrivé à une grande victoire, mais il y en a eu des victoires, sur ce chemin ! Et, au final, on peut bien croire que l’air qu’on respire à Limoilou, il est meilleur depuis que Véronique et Louis s’y sont attaqués ! » ajoute son frère.
À l’affiche dès le 9 mars
Les projections débuteront le 9 mars, au cinéma Le Clap. Jusqu’à quand? « Tant que les gens y vont, le film restera à l’affiche », assure Jonathan Seaborn. Il prendra ensuite l’affiche à Lévis, au Lido, dès le 16 mars. À Montréal, il sera au cinéma Beaubien. Les frères se rendront également, le 28 mars, le présenter à Victoriaville. Il sera de la programmation d’un festival de cinéma à Bruxelles.
Puis d’autres projections s’ajouteront, assurément.
La demande est là, et ça montre bien, justement, l’aspect international, universel, lié aux luttes citoyennes », conclut Jean-Laurence Seaborn.
Soutenez votre média
Contribuez à notre développement à titre d'abonné.e et obtenez des privilèges.