La déception était palpable, hier, chez les usagers du parc Roland-Asselin, dans le Vieux-Limoilou. Depuis des années, des jouets étaient laissés « en libre-service » dans ce parc de ruelle, entre le chemin de la Canardière et la 8e Rue. Bientôt, ces jouets n’y seront plus, l’administration municipale ayant indiqué son intention de les retirer dès le 18 juin et, au besoin, lors de ses tournées d’entretien subséquentes.
Veuillez noter qu’à compter du 18 juin prochain, tous les jouets devront être récupérés quotidiennement par leurs propriétaires. Les jouets à l’abandon ne seront plus laissés sur place lors des tournées d’entretien.
Un bref message qui vient sonner le glas d’une habitude vieille de plusieurs années déjà… C’est qu’au parc Roland-Asselin, les jouets « à l’abandon » sont monnaie courante. Des parents viennent y laisser camions, tricycles ou ballons plutôt que de les vendre, les donner ou les jeter. Une façon de « passer au suivant ». Parfois les jouets sont presque neufs, d’autres sont en mauvais état. Le classement se fait en partie de façon organique, en partie avec les efforts soutenus et proactifs des résidents riverains de la ruelle – certains jouets prenant le chemin de la poubelle, d’autres étant prisés par les enfants, tout particulièrement les tout-petits.
D’une façon, la présence de jouets était entrée, pour beaucoup de parents, dans l’ADN même du parc Roland-Asselin. Les jouets, c’est l’un des ingrédients qui font la particularité de ce lieu de voisinage, de ce milieu de vie.
Déception et consternation chez les usagers

La décision de l’administration municipale a semé la déception sur son chemin, tout particulièrement chez les usagers du parc : sur place, mais aussi sur les réseaux sociaux, notamment sur les groupes de quartier comme Limoilou, notre quartier, le meilleur de tous ! ou Les supermamans de Limoilou.
Ce parc reflète un esprit de communauté et de partage. Quant à moi, c’est mon préféré, car il y a des bancs pour s’asseoir et qu’on y fait souvent de belles rencontres. Il est divertissant pour mon fils : c’est là qu’il a monté son premier bicycle, gracieuseté d’un parent qui a souhaité partager la fin de vie de ce vélo. L’auto rouge au toit jaune, un jouet trop gros pour mon 4 et demi, était un succès à tous les coups ! Les autos, les dinosaures et tous ces trésors font de ce parc un parc vivant ! » lance Chantal De Carufel.
Discours similaire chez un père de famille, Jean-Thomas Grantham : « Nous sommes des habitués et mes deux filles adorent ce parc. Les jouets font partie de l’identité de ce rendez-vous des familles. »
Je fréquente ce parc régulièrement, depuis que ma fille est toute petite. J’adore son côté communautaire. Quelle belle manière d’inculquer des valeurs de partage à nos enfants, de développer le sens du commun, de montrer qu’il n’y a pas que du "mon" et du "son", mais aussi du "nôtre"… Sans compter le côté "deuxième vie" offert aux jouets… Je trouve cette décision bien triste », remarque Émilie Desgagné.
Au-delà des usagers, la décision aura fait également réagir des descendants de Roland Asselin et Françoise Viger, résidents à l’origine du développement de ce lieu unique. Une décision qui n’a « aucun sens » aux dires de la fille de Françoise, Véronique. « Elle a, à l’époque, fait détruire des garages pour faire une place pour les enfants, ils se sont fait un devoir d’en prendre soin… Je n’ai pas envie de laisser ça passer ! » lance-t-elle par le biais des réseaux sociaux.
Une plainte à l’origine de la décision de la Ville

C’est une plainte qui est à l’origine de cette décision de l’administration municipale. Des citoyens riverains qui ont demandé à ce que les jouets soient retirés du lieu, considérant que celui-ci était devenu au fil des semaines un « dépôt à jouets ».
Au-delà de la colère et de la frustration, plusieurs usagers se sont mis en quête de solutions. L’échéance du 18 juin émise par la Ville de Québec est-elle irrévocable ? L’administration municipale autant que les citoyens riverains à l’origine de la plainte sont-ils ouverts à une solution de rechange ?
L’hypothèse de bacs à jouets en libre-service a été nombre de fois évoquée, plusieurs rappelant que de telles installations existent déjà dans certains parcs de Québec ou Lévis.
Pressés par l’échéance rapide de l’avertissement lancé par la Ville de Québec, des usagers du parc tentent de s’organiser, question de sauver les jouets et, à travers eux, de sauver l’âme de ce lieu sans équivalent dans le quartier.
« On cherche, actuellement, une façon de garder un peu d’ordre dans les jeux, afin que ceux en bon état puissent rester. Il est important de se responsabiliser, de responsabiliser les familles et les usagers du parc là-dedans, que tous prennent soin des jouets », indique Marie-Michèle Gagnon, qui a commencé, de son côté, à faire quelques démarches et appels téléphoniques.
Et elle n’est pas la seule, alors que beaucoup espèrent pouvoir réussir à s’organiser et ainsi mettre en place une solution avant le 18 juin, avant que les jouets ne disparaissent du parc Roland-Asselin.