La rivière Lairet : notre terrain de jeux

Auteur de D’Irlande, de Limoilou et d’ailleurs, Denys Hawey partage pour nos lecteurs et lectrices ses souvenirs de jeunesse. Il nous raconte ici ses jeux d'enfants près de la rivière Lairet.

La rivière Lairet : notre terrain de jeux | 10 octobre 2021 | Article par Monlimoilou

La rivière Lairet près de la rue des Chênes en 1962.

Crédit photo: Archives de la Ville de Québec

Auteur de D’Irlande, de Limoilou et d’ailleurs, Denys Hawey partage pour nos lecteurs et lectrices ses souvenirs de jeunesse. Il nous raconte ici ses jeux d’enfants près de la rivière Lairet.

Quand j’étais ti-cul, notre terrain de jeux, c’était le méandre de la rivière Lairet.

Dans ma jeunesse, au début des années 1960, la Lairet n’avait pas le débit du temps des premiers colons, alors qu’on l’empruntait en bateau. La rivière n’était plus qu’un ruisseau d’eau très pollué, qui coulait du nord-ouest vers le sud-est, de Charlesbourg, jusqu’à ce qui est devenu le parc Cartier-Brébeuf, où elle rejoignait son confluent, la rivière Saint-Charles.

Notre segment de rivière, notre royaume

Avec l’urbanisation du nord du quartier Limoilou, la création des nouvelles paroisses de Saint-Albert-le-Grand et, plus tard, de Sainte-Odile, on avait tracé des rues et une canalisation qui permettaient à la Lairet de poursuivre son cours sous les rues.

Ainsi, les rues délimitaient le terrain de jeux que s’étaient appropriés les jeunes. Ceux qui demeuraient, par exemple, sur la rue des Peupliers et sur la rue voisine, la rue des Pins, avaient marqué de leur sceau de propriété le segment de la rivière qui coulait entre ces rues. Les jeunes des rues des Chênes et des Bouleaux en avaient fait autant pour la partie du cours d’eau qui traversait leurs rues.

Il n’était pas question de permettre aux jeunes des autres segments de la rivière de venir sur celui qui constituait notre royaume. C’était une vraie « Guerre des tuques » : gare à ceux qui transgressaient les règles de propriété, c’était la guerre!! Il arrivait qu’un groupe de jeunes fasse appel aux frères aînés pour régler un différend. Mon jumeau Richard et moi n’avions pas ce privilège.

La Lairet s’était donc encavée avec le temps. Elle sillonnait tout au fond d’un canal avec des parois de terre profondes. Ses rebords glaiseux rendaient la descente hasardeuse, surtout par temps humide. Il n’était pas rare qu’un membre de mon groupe perde pied et glisse inéluctablement tout au fond du canal, atterrissant les pieds dans l’eau boueuse et dérangeant quelques rats musqués.

Les concombres sauvages comme « grenades »

On retrouvait une végétation particulière le long de la rivière Lairet. On y cueillait des quenouilles qu’on utilisait comme des torches, la nuit tombée. On imbibait l’extrémité de la quenouille d’essence et on l’allumait.

Concombre sauvage sur sa tige
Concombre sauvage sur sa tige
Crédit photo: Jean Cazes

Puis on cueillait aussi des concombres sauvages, les fruits d’un plante singulière. Ils étaient de forme ovale, gros comme des abricots, de couleur verte, avec des aiguilles qui s’accrochaient aux vêtements. L’intérieur était vide et, lorsqu’on l’ouvrait, le fruit dégageait une substance laiteuse. On utilisait les concombres sauvages comme « grenades » dans nos jeux d’attaque de ti-gars. Puis, il y avait une profusions de toques. Ces petites boules recouvertes d’aiguilles – on aurait dit des velcros – qui s’agrippaient au tissu des vêtements ou qui s’entremêlaient dans la chevelure des « ennemis ».

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Finalement, notre royaume avait été englouti quand les autorités municipales avaient décidé d’enfouir à tout jamais toute la rivière Lairet. Je me souviens qu’à cette occasion, nous étions installés dans le « tambour », la galerie surélevée des Bergeron, nos voisins arrière. Nous regardions la centaine de rats qui traversaient le terrain, à la recherche d’un autre lieu sûr.

Legs pour ses deux enfants et leurs propres enfants, D’Irlande, de Limoilou et d’ailleurs a fait l’objet d’un article sur Monlimoilou. L’histoire de famille et la vie de jeunesse de Denys Hawey, qu’il raconte en 426 pages enrichies de photos, est disponible exclusivement à la Librairie Morency.

Lire l’épisode précédent des souvenirs de Denys Hawey : Ma mère, l’institutrice.

Voir la série sur la Lairet par Réjean Lemoine, Chronique d’une rivière disparue :

  1. Introduction
  2. Les caractéristiques naturelles de la Lairet
  3. L’histoire sur les bords de la Lairet
  4. Les premiers signes de détérioration de la Lairet
  5. Enquête du département de la santé et projet de canalisation dans les années 1940
  6. Le projet de canalisation de la Lairet
  7.  Les difficiles années 1950
  8. La canalisation de la Lairet enfin réalisée!

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