Auteur de D’Irlande, de Limoilou et d’ailleurs, Denys Hawey partage pour nos lecteurs et lectrices ses souvenirs de jeunesse. Il évoque aujourd'hui une époque où les activités sportives et sociales se déroulaient au rythme de la « paroisse ». C'était le cas du cinéma le dimanche.
Les gens de ma génération sont tous familiers avec le concept de « paroisse ». Si la paroisse était la base territoriale de la religion catholique, avec son église, elle avait aussi une signification aux niveaux social et culturel. Les OTJ (Organisation des Terrains de Jeux), les scouts, l’école et les brigadiers, les soirées dansantes, les bingos, les séances de cinéma : tout se faisait au niveau de la paroisse.
Un fort attachement à « sa » paroisse
Les gens avaient ainsi développé un sentiment d’appartenance à leur cellule paroissiale. D’ailleurs, contrairement à aujourd’hui – alors que l’inclusion et la diversité sont, avec raison, fortement promues et encouragées – il faut bien admettre qu’à une époque pas si lointaine que j’ai connue, les paroisses favorisaient davantage la micro-discrimination sociale et culturelle.
Ainsi, on croyait qu’un résident de la paroisse de Saint-Pascal-de-Maizerets, par exemple, avait une façon de penser différente, même incompatible, avec le résident de la paroisse de Saint-Charles-de-Limoilou. Aussi, quand, par exemple, un jeune de la paroisse de Sainte-Claire-d’Assise s’aventurait à traverser le territoire de la paroisse voisine de Saint-Zéphirin-de-Stadacona (qu’on appelait couramment « Stokane »), il devait s’atteler et pédaler. Sinon, il risquait d’être identifié comme un « étranger » par les jeunes de Stokane. On allait alors lui faire comprendre avec forte évidence qu’il avait franchi les limites d’un autre territoire paroissial.
Aujourd’hui, les paroisses disparaissent par fusions avec les autres. Les églises paroissiales sont démolies ou converties vers d’autres vocations, voire laissées à l’abandon, en raison du manque de clientèles. À mon époque, au contraire, les paroisses naissaient et se multipliaient grâce à l’augmentation de nouveaux résidents sur le territoire.
Chaque nouvelle paroisse se faisait un devoir et un honneur de prétendre à la plus belle église catholique du quartier, soutenue financièrement par ses résidents et pratiquants.
Évidemment, il en allait de même pour les Caisses populaires. Chaque paroisse se devait de créer sa coopérative financière, qui s’installait bien souvent, au début, dans un local de l’église. D’ailleurs, les premiers conseils d’administration des Caisses populaires ainsi que les marguilliers responsables du fonctionnement des églises et des activités paroissiales étaient souvent les mêmes.
Le cinéma au sous-sol de l'église Sainte-Odile

Pour revenir aux activités sociales et culturelles, j’ai encore souvenir de mes premières séances de cinéma – qu’on appelait les p’tites vues – dans ma nouvelle paroisse de Sainte-Odile. Tous les jeunes de la paroisse se rendaient dans le sous-sol de l’église, soit la salle paroissiale. Ça se passait normalement le dimanche en après-midi. Il y avait toujours deux films à chaque séance.
Les plus choyés se payaient un « verre de liqueur » en fontaine avec un sac de chips. Ils devaient faire vite : les adultes en charge de l’organisation ne toléraient pas qu’on se lève ou qu’on se déplace pendant la séance de cinéma.
J’y ai vu mon premier Josélito, L’Enfant à la voix d’or, du nom de ce jeune chanteur italien qui faisait un tabac, surtout chez les filles. Je me souviens aussi de mon premier visionnement du film Ben Hur, avec Charlton Heston, un film du temps de l’empire romain à l'affiche au début des années 1960.
Legs pour ses deux enfants et leurs propres enfants, D’Irlande, de Limoilou et d’ailleurs a fait l’objet d’un article sur Monlimoilou. L'histoire de famille et la vie de jeunesse de Denys Hawey, qu'il raconte en 426 pages enrichies de photos, est disponible exclusivement à la Librairie Morency.
Lire l'épisode précédent des souvenirs de Denys Hawey : Mon oncle Armand, des As de Québec.