Les Lacordaire et la tempérance à Québec

Auteur de D’Irlande, de Limoilou et d’ailleurs, Denys Hawey partage pour nos lecteurs et lectrices ses souvenirs de jeunesse. L'auteur évoque aujourd'hui l'engagement social de son grand-oncle, Roland Lelièvre, pour la tempérance dans les années 1950.

Les Lacordaire et la tempérance à Québec | 22 mai 2022 | Article par Monlimoilou

La famille Lelièvre au complet. De gauche à droite : Roland Lelièvre, Denys, 4 ans, Mme M. a, Lelièvre (Claire Sylvain à la radio), Michel, 15 ans, Claire,  9 ans, et Sylvain, 12 ans. (Samedi, 30 juillet 1955. Photo : Lanouette)

Crédit photo: Denys Hawey (archives familiales)

Auteur de D’Irlande, de Limoilou et d’ailleurs, Denys Hawey partage pour nos lecteurs et lectrices ses souvenirs de jeunesse. L’auteur évoque aujourd’hui l’engagement social de son grand-oncle, Roland Lelièvre, pour la tempérance dans les années 1950.

Dans la première moitié du siècle dernier, et jusque dans les années 1960, les organisations anti-alcooliques et les sociétés favorisant la tempérance, voire la totale abstinence de consommation des boissons alcoolisées, avaient le vent dans les voiles partout au Québec¹. L’alcoolisme était le « Grand fléau du jour ».

On organisait des conférences sur « les propriétés des produits délétères des liqueurs spiritueuses ». Ainsi, la Ville de Québec avait adopté, en 1906, un règlement pour « la fermeture à sept heures du soir, le samedi, de toutes les buvettes dans les établissements où l’on vend des liqueurs enivrantes ».

Mon grand-oncle Roland Lelièvre, président du Cercle Lacordaire de Québec

Le Samedi, 30 juillet 1955. (CLIQUER POUR AGRANDIR)
Crédit photo: Denys Hawey (archives familiales)

Durant les années 1950, c’est dans ce courant de tempérance que les soirées familiales se passaient au sein de beaucoup de familles, dont la mienne, la famille Hawey.  

Les parents et amis ne s’ennuyaient pas pour autant. La sœur de mon grand-père, tante Lucette, jouait du piano. Elle l’enseignait aussi. Tante Cécile, tante Marie-Ange et oncle Roland Lelièvre faisaient du théâtre et de la radio, et même les débuts de la télévision. Marie-Ange Hawey avait adopté le nom de Claire Sylvain, les prénoms de ses deux enfants. Le clan avait même monté un spectacle aux Halles Saint-Pierre, devenu plus tard le centre Durocher, dans Saint-Sauveur.

Évidemment, on se permettait une « santé » dans le temps des Fêtes, mais pas plus! Grand-papa préparait la boisson des Fêtes. C’était de la « chartreuse » : de la jaune et de la verte. Il achetait aussi un gallon de vin Saint-Georges. Pas de bière!

Mon oncle Roland Lelièvre – il était en fait mon grand-oncle – était président du Cercle Lacordaire, à Québec, un mouvement fort populaire contre l’alcoolisme dans le Québec de cette époque.  

Roland était un personnage bien connu ici pour être reporter à Radio-Canada (CBV). Il avait beaucoup de charisme, de charme, une personnalité distinguée. Mais il ne se prenait pas pour un autre et il avait beaucoup de plaisir à se faire taquiner par grand-Maman, qui était du genre bon vivant.

Rencontres en famille et chocolats… à la liqueur

Dans les soirées familiales qu’organisaient mes grands-parents, ma grand-mère Berta, comme on l’appelait, était la taquine, la boute-en-train. Elle se « désâmait » pour surprendre Roland. Je me souviens qu’elle remplaçait des chocolats de la boîte Laura Secord par des chocolats contenant des liqueurs (cognac, rhum). Elle en offrait à Roland et lui suggérait les chocolats qu’elle avait secrètement remplacés…

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Grand-papa avait pris beaucoup de temps à offrir un digestif à ses enfants devenus adultes. Il ne servait que les personnes de sa génération. Je présume qu’il ne voulait pas paraître trop « libéral » devant son beau-frère Roland qui présidait le Cercle Lacordaire de Québec.

Mon père et ses frères ne s’en offusquaient pas. En fait, mon père, qui s’occupait d’un club avec bar, en riait et il racontait cette anecdote à ses amis.

Finalement, à l’arrivée des années 1970, avec ma propre génération qui poussait, nous avions eu le privilège de prendre un, mais un seul, digestif avec nos parents et nos grands-parents dans les soirées de famille!

Legs pour ses deux enfants et leurs propres enfants, D’Irlande, de Limoilou et d’ailleurs a fait l’objet d’un article sur Monlimoilou. L’histoire de famille et la vie de jeunesse de Denys Hawey, qu’il raconte en 426 pages enrichies de photos, est disponible exclusivement à la Librairie Morency.

¹ https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1767567/alcool-consommation-abstinence-quebec-archives

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