Les commerces que fréquentait mon père

Auteur de D’Irlande, de Limoilou et d’ailleurs, Denys Hawey partage pour nos lecteurs et lectrices ses souvenirs de jeunesse. Aujourd'hui, il évoque les liens privilégiés que son père avait tissé avec des commerces locaux.

Les commerces que fréquentait mon père | 12 juin 2022 | Article par Monlimoilou

L’intersection 10e Rue et 3e Avenue, avec, sur la droite, la boucherie L. P. Couture. 21 mai 1974.

Crédit photo: Jocelyn Paquet (collection personnelle)

Auteur de D’Irlande, de Limoilou et d’ailleurs, Denys Hawey partage pour nos lecteurs et lectrices ses souvenirs de jeunesse. Aujourd’hui, il évoque les liens privilégiés que son père avait tissé avec des commerces locaux.

Mon père, que j’ai toujours appelé par son prénom, Pierre, avait ses commerces d’habitude. Il a toujours été très fidèle envers ces propriétaires de petits commerces de proximité.

Quand je lui demandais pourquoi il persistait à faire ses achats dans un de ces commerces, qui vendait très probablement plus cher que les grandes chaînes, Pierre n’hésitait pas à faire valoir l’importance d’encourager des gens du quartier et son intérêt à bénéficier d’un service personnalisé.

Chez monsieur Gagné pour maintenir sa « brosse »

Pierre a toujours fréquenté le même barbier. C’était un petit salon « au coin de la troisième et de la cinquième », comme il disait, sans avoir à préciser quelle était l’avenue, ou la rue.

Pierre était fier et coquet. Célibataire, il passait au salon de Robert Gagné au moins une fois par semaine pour maintenir sa « brosse », sa coupe de cheveux, et pour en faire brûler les extrémités. On disait que ça renforçait les cheveux. Il faut croire que ça fonctionnait, car Pierre n’avait jamais souffert de calvitie.

Dès que mon jumeau Richard et moi avions eu la teigne éparse, c’est avec fierté qu’il nous emmenait chez monsieur Gagné pour une coupe de cheveux. Il avait conséquemment dû espacer ses visites personnelles, question de budget.

La 1re Avenue avec sa tabagie Veilleux en 1978.
Crédit photo: Archives de la Ville de Québec

Aussi quand, le matin, mon frère et moi profitions d’un « lift » en voiture avec Pierre pour nous rendre à Saint-Jean-Eudes, nous arrêtions systématiquement à la tabagie Veilleux, au coin de la 1re Avenue et de la rue Hamilton. Chaque matin, un de nous deux descendait de voiture pour aller chercher le journal du matin et un cigare, pour Pierre.

Pierre raffolait des produits de la boucherie Couture, située « au coin de la trois, pis de la dix ». Selon lui, c’est là qu’on trouvait les meilleurs cretons. Et que dire de la tête fromagée!

La « filière anglo »

Puis, Pierre exploitait régulièrement la filière commerciale des patronymes anglos de Limoilou. Lors d’occasions spéciales, il se rendait par exemple chez le fleuriste McKenna, sur la 3e Avenue pour commander des arrangements floraux.

Publicité

Il fréquentait aussi assez régulièrement la bijouterie Webster. La bijouterie était également sur la 3e Avenue, « entre la onze, pis la douze ». Pierre y trouvait les montres qu’il donnait en cadeau à ma mère, à au moins deux ou trois reprises par année.

Maman était une « grugeuse » de montres. Les deux dames qui tenaient boutique étaient des sœurs, célibataires. Elles semblaient être siamoises, car elles partageaient le même appartement et elles ne se quittaient pas d’une semelle. Les sœurs Webster visitaient régulièrement mes grands-parents. Il y avait aussi un monsieur Milligan qui passait souvent.

Pierre s’occupait du club des employés civiques. On y tenait régulièrement des activités sociales qui nécessitaient l’apport d’un traiteur : party aux huîtres, célébration des Fêtes, etc. Il ne transigeait qu’avec un traiteur : celui du Woolworth sur la rue Saint-Joseph. Le patron était un monsieur Tendland. Mon père avait une confiance aveugle en monsieur Tendland. On l’entendait souvent vanter la qualité des plats préparés par son équipe, surtout la sauce crémeuse aux huîtres. Je croyais que Pierre parlait d’un monsieur Glenn, Ted Glenn.

À ma connaissance, tous ces gens des quartiers Limoilou et de Saint-Roch, comme mon père, dotés d’un patronyme anglo-saxon, ne disaient pas un mot d’anglais.

Legs pour ses deux enfants et leurs propres enfants, D’Irlande, de Limoilou et d’ailleurs a fait l’objet d’un article sur Monlimoilou. L’histoire de famille et la vie de jeunesse de Denys Hawey, qu’il raconte en 426 pages enrichies de photos, est disponible exclusivement à la Librairie Morency.

Voir le souvenir précédent :

Les vendredis de mon enfance

Soutenez votre média

hearts

Contribuez à notre développement à titre d'abonné.e et obtenez des privilèges.

hearts
Soutenir