Nous étions quatre jeunes de la 4e Avenue qui faisions fièrement partie du Club des «Ti» : Ti-Gilles, Ti-Pierre, Ti-Guy et moi, Ti-Dré. Ti -André se prononçait mal, alors... on m'a surnommé Ti-Dré !
« Ti-Paul », un conte pour Limoilou
Nous étions quatre jeunes de la 4e Avenue qui faisions fièrement partie du Club des «Ti» : Ti-Gilles, Ti-Pierre, Ti-Guy et moi, Ti-Dré. Ti -André se prononçait mal, alors… on m’a surnommé Ti-Dré !
Nous avions une douzaine d’années et nous passions beaucoup de temps ensemble à jouer au baseball l’été dans la ruelle, et surtout, au hockey-balle douze mois par année.
L’hiver venu, on en venait à délaisser la ruelle une fois la patinoire des Doyon aménagée. Une belle petite patinoire bien entretenue et même éclairée le soir.
Deux semaines avant Noël, alors qu’après un match serré contre les gars de la 3e Avenue nous nous reposions assis sur un banc de neige, on remarqua un gars qui avait suivi notre match avec intérêt.
— Salut, demanda Ti-Gilles. C’est quoi ton nom ? T’es nouveau dans l’boutte ?
— C’est Paul, mon nom. On vient de déménager, répondit timidement le nouveau venu qui était plutôt maigrichon et qui portait un manteau beaucoup trop grand pour lui.
— Tu sais jouer au hockey? demanda Ti-Gilles.
— Pas beaucoup, pis j’sais pas patiner, répondit Paul.
— Pas grave. Tu pourrais goaler, déclara Ti-Guy. On cherche toujours un goaler. Nous autres, on veut scorer comme le Rocket ou Jean Béliveau. Personne aime ça, jouer dans les buts.
— Pis pas besoin de patins, ajoutai-je. Tu peux jouer en bottes. Mets-toé dans l’but, on va voir ce que tu peux faire.
On donna à Paul un vieux bâton, des jambières et une mitaine de gardien. À tour de rôle on shoota la balle vers notre apprenti goaler. Le gars arrêta presque tous les lancers. Pour une recrue, c’en était toute une !
— Un naturel ! déclara Ti-Pierre, qui était ben content qu’on ait trouvé un cerbère pour le remplacer. Lui, il aimait jouer à l’avant. Il ajouta :
— Ben mon gars, si ça te tente, tu seras notre goaler officiel. Paul, t’es maintenant Ti-Paul. On joue demain à neuf heures.
— Merci les gars ! dit Paul en souriant. J’vas être là, comptez sus moé !
Ti-Gilles, qui avait l’âme d’un détective, apprit que Ti-Paul habitait sur la 15e, que son père était au chômage et que la famille en arrachait. Avec Ti-Paul dans les filets, on gagna presque tous nos matchs avant Noël, même si notre super gardien jouait avec un vieux bâton.
— Y arrête toute, pis y a même pas un vrai bâton de goaler ! dit Ti-Pierre.
Un après-midi de tempête, toute la gang des «Ti-» se retrouva chez nous pour jouer au Monopoly.
— Moé, j’ai demandé un jeu de mécano pour Noël, dit Ti-Gilles. Les autres enchainèrent : moé, un train électrique, moé un jeu de hockey sur table…
— Pis toé, Ti-Paul ? demandai-je. ça va être quoi, ton cadeau?
— Rien ! répondit-il les yeux pleins d’eau.
Quand Paul fut parti, nous étions très tristes.
— On pourrait y en acheter un, un cadeau ? dit Ti-Guy. On se cotise pis on va chez Nap Côté Sports. C’est six piasses, un vrai hockey de goaler. Une affaire de rien.
La veille de Noël, Ti-Guy arriva à la patinoire avec un gros paquet mal enveloppé.
— Tiens, Ti-Paul, ton cadeau de Noël !
Paul déballa le paquet et découvrît un super bâton de goaler CCM qu’il contempla de longues minutes.
— Wow, les gars. C’est mon plus beau cadeau de Noël. C’est mon seul cadeau depuis longtemps. Merci la gang !
— On l’a même tapé, dit Ti-Pierre, fièrement.
Et c’est ainsi que Ti-Paul, avec ses arrêts miraculeux, nous fit gagner le fameux trophée Tour du Bloc. Un vrai cadeau pour nous aussi !
* * *
Durant six ans, régulièrement, André Lévesque a bien gâté Monlimoilou avec ses souvenirs d’enfance. dans les années 1950 et 1960. On peut par ailleurs les apprécier dans son ebook : https://www.edition999.info/Limoilou-au-quotidien.html.
Par la même occasion, nous vous invitons également à découvrir ou relire durant les Fêtes les souvenirs limoulois d’un autre précieux ex-collaborateur : Denys Hawey.
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