La partie commerciale de la 3e Avenue pourrait changer considérablement d'aspect dans les années à venir. Deux concepts préliminaires d'aménagement ont été présentés par l'équipe Vélo cité pour le tronçon de la 3e Avenue entre le chemin de la Canardière et la rue du Prince-Édouard. Entre sens unique ou retrait de stationnements, les deux propositions semblent loin d'avoir l'appui des commerçants du secteur.
Corridor Vélo cité : entre un sens unique sur la 3e Avenue ou du stationnement d’un seul côté
La partie commerciale de la 3e Avenue pourrait changer considérablement d’aspect dans les années à venir. Deux concepts préliminaires d’aménagement ont été présentés par l’équipe Vélo cité pour le tronçon de la 3e Avenue entre le chemin de la Canardière et la rue du Prince-Édouard. Entre sens unique ou retrait de stationnements, les deux propositions semblent loin d’avoir l’appui des commerçants du secteur.
Une quinzaine de commerçants étaient présents lundi soir au centre communautaire Jean-Guy Drolet, dans Limoilou. Ils avaient été invités par la ville de Québec à s’exprimer sur deux concepts d’aménagement entourant le tronçon numéro 5 du corridor Vélo cité (CVC) reliant Charlesbourg au centre-ville, un tronçon d’une longueur d’1,14 km.
Rappelons que la Ville de Québec prévoit l’aménagement de 150 kilomètres de voies cyclables sécurisées. quatre-saisons d’ici l’année 2034.
Sens unique ou retrait de stationnement
En cours de soirée, deux concepts préliminaires d’aménagement ont été dévoilés.
Dans un premier scénario, la 3e Avenue conserverait son double sens pour les véhicules. On aménagerait également des pistes cyclables unidirectionnelles légèrement surélevées de la chaussée et séparées du trottoir de chaque côté de l’artère. En contrepartie, on conserverait seulement du stationnement d’un côté de la rue.
Le 2e scénario, quant à lui, propose carrément un sens unique pour les automobiles en direction sud. Dans ce cas-ci, du stationnement serait conservé des deux côtés de la 3e Avenue. Encore une fois, on aurait des pistes cyclables unidirectionnelles légèrement surélevées et une séparation entre le lien cyclable et le trottoir.
Dans les deux cas envisagés, la Ville prévoit l’ajout de mobilier urbain et de zones de plantation.
Levée de boucliers
Après la présentation, la Ville invitait les commerçants à se pencher sur les deux scénarios et à exprimer leurs préoccupations ou leurs préférences.
Avant même le début de cette séance plénière, certains ont exprimé diverses préoccupations autour de ces deux scénarios.
Quelques personnes ont notamment exprimé des doutes sur les statistiques d’une étude réalisée par Vélo Québec en 2022, selon laquelle l’ajout d’un lien cyclable sur une artère commerciale augmente de 37% le nombre de visites et de 35% le chiffre de ventes au détail.
«Pour moi, et je pense que pour les commerçants ici, ça ne vaut pas grand chose, parce que ce n’est pas adapté du tout à notre situation. Je pense que la prochaine fois, ce qui pourrait être intéressant, c’est d’avoir des statistiques sur les corridors Vélo cité que vous avez fait à Québec. Qu’est-ce qu’ils en pensent les commerçants? Comment ils vivent ça? Est-ce qu’il y en a qui ont fermé? […] Moi, le 37% d’augmentation, je n’y crois pas», a affirmé Martin Claveau, président de la SDC 3e Avenue.
Jérôme Nadeau, ingénieur et chef d’équipe chez Vélo cité, lui a répondu que les analyses étaient toujours en cours avec Moneris pour le chemin Sainte-Foy, mais que celles-ci peuvent prendre du temps.
«En ce moment, les statistiques sont positives par rapport aux dépenses, depuis l’installation du lien cyclable sur le chemin Sainte-Foy. Malheureusement, on n’a pas encore toutes les données. Il faut laisser un an s’écouler pour avoir le “après”», précise M. Nadeau.
Le président de la société de développement commercial estime aussi que la Ville n’a pas tenu compte de la fonction commerciale.
«Les commerces, pour eux, ça représente un risque. […] Dans votre présentation, je n’ai pas senti cette sensibilité-là», a renchéri Martin Claveau.
Pour Pierre-Luc Lachance, vice-président du comité exécutif responsable de la mobilité et de la sécurité routière, si cette préoccupation n’avait pas été prise en compte, il n’y aurait pas eu de soirée de consultation consacrée aux commerçants.
«Aujourd’hui, je pense qu’on fait un premier geste. On va continuer à le faire, nécessairement dans la conception, parce qu’on vous réunit aujourd’hui pour prendre votre “input”. Mais […] notre rôle comme ville demeure l’ensemble de la communauté. Il faut trouver les voies de passage», a répondu M. Lachance.
Échanges animés et préoccupations nombreuses
En cours de plénière, des échanges parfois animés ont aussi eu lieu, impliquant notamment Pierre-Luc Lachance et quelques commerçants de la 3e Avenue.
Plusieurs d’entre eux auraient plutôt souhaité que le nouvel aménagement soit fait sur la 4e Avenue. Un commerçant a d’ailleurs évoqué que le tramway devait passer sur la 4e Avenue (précisons que le plan CITÉ a changé le dernier tracé envisagé par la Ville et qu’il ne passerait pas sur la 4e Avenue avant une 2e phase). Pour lui, il serait normal que les deux modes de transport (vélo et tramway) cohabitent sur la même artère. Cette option était d’ailleurs défendue par plusieurs de ses voisins.
Dans un autre cas, un restaurateur qui se trouve sur le tronçon a plutôt remis en doute la validité du questionnaire mené auprès des citoyens à l’été 2024. 859 personnes ont répondu, dont 489 qui résident dans le Vieux-Limoilou. Pour lui, ce sont principalement des «militants» qui participent à ce type de consultation.
Celui-ci estime aussi que 75% de sa clientèle qui fréquente son restaurant utilise la voiture et se stationne à proximité. Il craint d’ailleurs que les gens qui vont chercher de la nourriture pour emporter préfèrent fréquenter un compétiteur, où le stationnement serait plus simple.
Une commerçante a, de son côté, évoqué la possibilité d’aménager des stationnements à 45 degrés, afin de conserver un plus grand nombre d’espaces possibles. Dans ce tronçon, plus d’une cinquantaine de places de stationnement sont actuellement disponibles.
Les enjeux entourant la livraison préoccupaient également divers commerçants, que ce soit pour la livraison de gros volume ou pour celles en lien avec des entreprises comme UberEats ou DoorDash.
Moratoire
De son côté, la SDC 3e Avenue a déposé une proposition de moratoire d’une année sur le tracé du tronçon à l’étude, afin que «faire les analyses nécessaires et procéder aux consultations appropriées avant toute décision finale sur le sujet».
Pour les représentants de la SDC, celle-ci «n’a pas été consultée sur le choix de la 3e Avenue à titre d’axe principal du tronçon numéro 5 du projet CVC Charlesbourg/Centre-ville», tout comme les commerçants de l’artère. Ils déplorent aussi que «les questionnaires administrés à ce jour relativement au projet CVC Charlesbourg/Centre-ville n’offraient pas l’option de refuser le tracé déjà choisi du tronçon numéro 5».
La proposition de la SDC stipule aussi que «le choix de la 3e Avenue tel que prévu aura des impacts négatifs prévisibles sur la vitalité commerciale et économique des entreprises situées sur le tracé du tronçon numéro 5».
Gaëtan Hébert, président de la SDC 3e Avenue, a détaillé la proposition durant la soirée et souhaitait passer au vote en cours de soirée, pour obtenir l’appui des commerçants présents. La conseillère en consultations publiques de la Ville, Anne Pelletier, lui a plutôt suggéré d’adopter cette résolution à l’intérieur des instances prévues habituellement par la SDC. Un commerçant a aussi exprimé son malaise sur le fait de voter durant la soirée, alors que des membres de la SDC n’étaient pas présents lors de la rencontre.
Martin Claveau a aussi rappelé que le quartier a été au cœur de nombreux chantiers au cours des dernières années et que la 3e Avenue se retrouverait encore au cœur de ces travaux de construction.
Pourquoi la 3e Avenue ?
D’entrée de jeu, les représentants de l’équipe Vélo cité ont expliqué les raisons derrière le choix de la 3e Avenue pour ce tronçon du CVC.
Karine Chalifoux, architecte-paysagiste, a notamment expliqué qu’il y avait un plus grand nombre de destinations potentielles sur ce secteur de la 3e Avenue, où on trouverait «un plus fort potentiel de développement».
Elle ajoute qu’une opportunité se présente pour mettre à niveau le réseau cyclable déjà existant sur la 3e Avenue. Mme Chalifoux précise cependant que celui-ci nécessite une mise à niveau, en raison de risques plus élevés pour la sécurité des usagers. Elle note les risques d’emportiérage, les croisements entre vélos et voitures pour accéder au stationnement sur rue, l’absence de séparation physique, la faible visibilité aux intersections et l’étroitesse de la bande cyclable. Les stationnements seraient aussi trop étroits pour les voitures, alors que celles-ci peuvent déborder dans la piste cyclable.
De plus, pour la Ville, un CVC doit être accessible durant quatre saisons et l’aménagement actuel ne permettrait pas ce déneigement.
Mme Chalifoux souligne que d’autres données ont été analysées, que ce soit celles provenant de l’enquête Origine-Destination, du dernier recensement, d’àVélo ou même des statistiques qu’on retrouve sur des applications comme Strava. Elle ajoute aussi que d’autres tronçons ont été étudiés, dont la 4e Avenue et la piste cyclable du parc linéaire de la rivière Saint-Charles, mais que ceux-ci ne remplissaient pas suffisamment les critères recherchés.
À quelques reprises durant la plénière, les représentants de la Ville ont réitéré que le choix du tronçon était définitif.
Une autre soirée de consultation sur les deux scénarios est prévue ce jeudi, toujours au centre communautaire Jean-Guy Drolet. Cette fois-ci, les citoyens seront invités à exprimer leurs opinions et préoccupations autour des scénarios retenus. Les informations sont disponibles ici.
Le rapport de collecte de données, suite aux questionnaires menés à l’été 2024 autour du tronçon de la 3e Avenue, est disponible ici.
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