Le ballet matinal d’une famille limouloise dans les années 1960

Auteur de D’Irlande, de Limoilou et d’ailleurs, Denys Hawey partage pour nos lecteurs et lectrices ses souvenirs de jeunesse. Aujourd'hui, un nouveau récit teinté d'humour évoquant une belle amitié et une famille voisine.

Le ballet matinal d’une famille limouloise dans les années 1960 | 30 octobre 2022 | Article par Monlimoilou

Vie de quartier, juin 1966. Intersection des rues des Saules Est et Sir-Thomas-Chapais, dans Lairet.

Crédit photo: Archives de la Ville de Québec

Auteur de D’Irlande, de Limoilou et d’ailleurs, Denys Hawey partage pour nos lecteurs et lectrices ses souvenirs de jeunesse. Aujourd’hui, un nouveau récit teinté d’humour évoquant une belle amitié et une famille voisine.

C’était en première année d’école primaire, en 1960, que je m’étais fait un bon ami. Il s’appelait Daniel Roussel.

Ce n’était pas un hasard s’il demeurait près de chez moi; en tout cas, à une distance suffisamment raisonnable pour qu’il nous soit autorisé de la franchir en peu de temps les soirs et les weekends afin de jouer ensemble.

L’attente du lever familial dans le tambour

J’ai toujours aimé me lever tôt; j’aime encore cela d’ailleurs. J’avais pris l’habitude d’aller chez Daniel, tôt le matin, pour faire le trajet de l’école. Il m’était même arrivé de m’y rendre, par erreur, des matins de fin de semaine. J’avais attendu longtemps avant qu’on s’aperçoive que j’étais dans le tambour.

Lorsque je servais la messe à 5 h à Sainte-Odile, les matins de semaine, je retournais à la maison pour déjeuner et pour récupérer mon sac d’école. Vers 6 h 30, j’étais fin prêt pour poursuivre la journée et j’allais chercher Daniel chez lui.

Souvent, quand j’arrivais à destination, ses parents n’étaient pas encore debout et le cri de ralliement pour le réveil n’avait pas été lancé. Je m’installais dans le tambour et j’attendais l’ouverture des lumières dans la cuisine. Déjà, on pouvait entendre des voix quand la porte de la maison ouvrait vers moi pour sortir le chien. Ça n’avait pas été long qu’on ne faisait plus de sauts en m’apercevant dans le tambour.

Son père ou sa mère m’invitaient à entrer et à m’asseoir sur le bord de la porte, où il y avait un coffre contenant les bottes de la maisonnée. Je tentais de me faire oublier et j’admirais le spectacle du réveil d’une famille de plusieurs enfants, d’une vraie famille!

Je m’étais cependant fait graduellement intégrer dans les discussions matinales en raison de ma proverbiale distraction. En effet, c’était devenu presque un jeu pour chacun de m’examiner afin d’identifier avant les autres ce que j’avais oublié.

Certains matins, quand j’enlevais mes bottes en entrant dans la maison, quelqu’un constatait que je portais deux bas de couleurs différentes. D’autres fois, j’arrivais avec un gant dans une main et une mitaine dans l’autre. Il m’était aussi arrivé de partir de chez moi avec deux bottes du pied gauche. Mon jumeau ne cachait pas sa frustration quand il venait me rejoindre dans la cour d’école pour échanger une botte avec moi!

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« J’entends encore la voix un peu nasillarde de sa mère… »

La mère de mon ami était chargée de préparer les déjeuners de chacun. Plusieurs se servaient d’abord des céréales soufflées à partir d’un sac immense avant de recevoir leurs œufs avec rôties.

Pour un gars qui venait d’une famille de deux enfants, il me semblait que, chez Daniel, tout était disproportionné : les contenants de lait, les pains, la grosseur des pots de confiture, l’intensité des cris et des messages qui fusaient de haut en bas, d’un enfant à l’autre… Le père descendait en camisole avec ses Q-Tips qu’il réussissait à faire disparaître dans ses oreilles. Il me semblait que tous les matins, il était de bonne humeur! Il agaçait madame Roussel et son plus jeune, Claude, qui lui, à mon souvenir, avait le réveil pleurnichard.

J’entends encore la voix un peu nasillarde de sa mère qui n’en finissait plus d’essayer de réveiller Michel, l’aîné. La chambre de Michel donnait directement dans la cuisine, si je me souviens. Il y avait de la vie! Les filles riaient. Il me semble qu’elles étaient toujours, elles aussi, de bonne humeur. Quand la famille avait la visite d’une tante, c’était encore plus vivant. Elle ressemblait beaucoup à son père, me semblait-il. Ça ne devait pas être si tôt le matin, car il me semble la voir avec une pipe sertie de pierres précieuses au bec.

Tout cela faisait changement avec mes déjeuners. Mon père n’était pas du genre « jasant », surtout pas le matin! Il mettait la radio. Ça devait être du temps de Saint-Georges Côté, j’imagine.

Maman ne se levait pas en même temps que nous, sauf au premier jour de l’école. Après le premier jour, je ne la voyais plus. Il faut dire que je me levais toujours si tôt…

Legs pour ses deux enfants et leurs propres enfants, D’Irlande, de Limoilou et d’ailleurs a fait l’objet d’un article sur Monlimoilou. L’histoire de famille et la vie de jeunesse de Denys Hawey, qu’il raconte en 426 pages enrichies de photos, est disponible exclusivement à la Librairie Morency.

Le présent texte fera partie d’un recueil de nouvelles à paraître en formats papier et numérique sous le titre Mes entrailles bénies – Anecdotes de jeunesse à Limoilou.

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